L’Observatoire de l’infobésité et de la collaboration numérique (OICN), dont la Chaire FIT2 est partenaire académique, vient de publier son référentiel pour la troisième année consécutive (2023, 2024, 2025).
Fondée sur l’analyse de 190 millions de métadonnées d’emails et 3 millions de métadonnées de réunions, cette synthèse dévoile les traces numériques des boîtes aux lettres électroniques de 17 000 collaborateurs, managers et dirigeants, agrégées et anonymisées, afin de suivre les tendances qui se dessinent en matière de collaboration numérique professionnelle. Au menu, des bonnes nouvelles (notamment une prise de conscience dans les organisations du panel des nuisances de l’hyperconnexion)… mais aussi des moins bonnes qui incitent à faire de ce sujet un enjeu clé des politiques de qualité de vie au travail, de performance organisationnelle et de responsabilité environnementale.
L’analyse de Suzy Canivenc, notre chercheure associée, indique que d’une année sur l’autre, les plateformes collaboratives restent très peu utilisées et semblent avoir du mal à trouver leur place dans la panoplie des outils de communication professionnelle. Le nombre de non-usagers est certes en baisse, mais ceux-ci restent majoritaires à tous les niveaux hiérarchiques. En conséquence, il y a une aggravation du volume d’emails reçus (avec des échanges de plus en plus tournés vers l’interne). Cette situation entraîne une augmentation de la charge de travail numérique, particulièrement chez les managers.
Mais les augmentations de chiffres les plus fortes s’observent sur les réunions et n’épargnent aucune strate hiérarchique :
+50 % de temps passé en réunion, 30 % des jours de tunnels et, par ricochet, une augmentation du nombre d’emails
envoyés en réunion.
Ces chiffres rappellent que les réunions restent le premier facteur d’infobésité en entreprise, bien avant les emails.
Cette situation n’est cependant pas étrangère au développement des outils numériques : les visioconférences, qui facilitent l’organisation des réunions, participent en retour à les démultiplier.
Ainsi les chiffres corroborent les tendances de fond qui avaient été analysées par notre équipe dans l’ouvrage Numérique collaboratif et organisation du travail (S. Canivenc et M;-L. Cahier, 2023). Les maux issus de l’inflation d’outils numériques ne se modifieront pas sans une réflexion approfondie sur les processus de travail.